IN CITE/IN SITU

Exposition IN CITE/IN SITU

2012

Texte du catalogue par Bernard Point, commissaire d’exposition.

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IN CITE / IN SITU

Dès l’entrée dans ce foyer Clémenceau du Palais du Luxembourg, je me vois planté au-dessus des « instants » d’immobilisation IN SITU dans la CITE.
En réalité, je surplombe quatre tables qui alignent de multiples pauses en relation avec des silhouettes situées dans l’espace public. Chaque plateau est porteur d’images carrées et, par sa composition orthogonale, évoque une construction urbaine, voulue par Catherine Van den Steen qu’il me plaît de citer : « Chaque table est le lieu d’une accumulation qui vise à créer dans le rapport de chaque “instant” à l’ensemble, des effets de singularité qui traduisent finalement la richesse de la diversité. »

En réalité ce plan est une construction architecturale qui aligne douze triptyques, dont chacun se compose à partir d’une même image, qui triple la force de la présence humaine IN SITU.

Chaque arrêt dans l’espace urbain, photographié par l’artiste, est figé par une couleur gouachée sur l’horizontalité d’un sol, alors que les verticales disparaissent sous une autre teinte posée en aplat, violemment opposée à la première. Seules subsistent par le noir et blanc de leur support photographique une ou plusieurs silhouettes avec qui je peux dialoguer, mais qui associent ces deux couleurs en les faisant parler, tout en les opposant.

La deuxième image, en position centrale, retrouve ces mêmes personnages mais fixés chaudement par le rouge d’une couleur, toujours en aplat. Cette fois le réalisme du contexte urbain se donne à voir, et par ses allusions documentaires, met en valeur ces passants qui par une découpe monumentale, deviennent paradoxalement surréalistes.

C’est alors que la troisième image, identique et toujours de même taille, apparaît totalement photographique, mais paradoxalement encore, magique, grâce à la fonte nocturne du décor, et l’apparition éclairante de ces promeneurs du quotidien.

Ainsi sur ces tables en élévation par rapport au sol, je me trouve au niveau d’un parcours IN CITE, ponctué de stationnements interrogatifs qui fixent alternativement mes « instants » d’étonnantes révélations IN SITU. Mon droit de cité, me donne le pouvoir bienheureux de citer encore Catherine : « Par le dispositif que j’ai choisi pour cette première série, je pose la question du regard, la forme du triptyque permettant d’échapper à une vision unique, totalisante, de l’individu. »

L’artiste, par ces multiples étapes carrées, vient de me poser « principalement debout, c’est-à-dire dans cette position où l’on peut avancer, faire du chemin. » C’est le propre de la vie.

Un autre alignement, mais cette fois monumental et vertical, me met en déplacement au cœur d’une installation qui par sa « présence » à l’échelle humaine, me met en relation avec la diversité urbaine, sociale et culturelle, des individus croisés IN SITU. Huit grands dessins sur toile établissent, grâce à la structure de leurs châssis métalliques, un alignement diagonal de personnages isolés sur la blancheur translucide de leurs supports. Je peux comme tous les visiteurs me déplacer d’un panneau à l’autre, pour inverser le trouble de leur fausse transparence – trouble qui favorise cependant toujours des rencontres impromptues.

Catherine les a dessinés au trait, comme dans une sorte de parcours contournant leurs habits, mais en utilisant seulement le bleu et le rouge.
C’est ainsi que trois dessins contournés de bleu peuvent échanger avec trois autres, rouges, dans ce lieu marqué de façon permanente par le tricolore de sa fonction.

Nos déplacements labyrinthiques avec ces personnages fonctionnent en harmonie avec la continuité du tracé de leurs silhouettes, et s’inscrivent dans les méandres de la richesse d’échanges multiculturels.

Au début de ce parcours comme à la fin, deux grands dessins de même taille font se croiser deux personnes, l’une bleue l’autre rouge, afin de rendre encore plus dense ces échanges humains.

Grâce à la translucidité des supports et à leurs dimensions humaines je circule entre ces panneaux qui, légèrement détachés du sol, isolent encore davantage ces hommes et femmes qui sont en suspens dans l’espace. De par ce positionnement, leur véritable taille à échelle humaine domine la nôtre tout en se laissant vêtir des piétinements de tous les visiteurs/regardeurs, qui de face ou de dos associent ces images translucides à la mouvance d’une population à égalité sur ce territoire. Encore une fois, un merveilleux paradoxe !
Cette mise en espace dans ce lieu investi subtilement par Catherine Van den Steen donne à ses œuvres une ponctuation de « présences » multiples, associant visiteurs et participants au colloque « Égalité et Territoire ». Tous, ils emprunteront cette avenue conduisant à l’amphithéâtre…

Nous sommes vraiment… IN CITE / IN SITU.